A la Rencontre des idées et des pratiques en psychologie et psychanalyse

suite de la conférence : 'Accompagner l'adolescent'

Comment accompagner l'adolescent (suite)
Comment ce trajet de leur vie va venir s’inscrire dans une histoire qui a commencé bien avant le jour de sa naissance, et peut-être bien avant la vôtre ? Quand vos adolescents font ce qu’on appelle « la crise d’adolescence », ils s’inscrivent dans une histoire et vous ne pouvez comprendre leur adolescence si vous ne connaissez pas votre histoire.

Vous ne pouvez être le père de votre fils si vous ne savez pas où vous en êtes par rapport à vos propres parents…

Notre rapport avec nos familles est un chemin compliqué nous donnant des rendez-vous symboliques : le jour où une maladie, une mort, un déménagement, un anniversaire nous font un clin d’œil, ce jour là nous sommes contraints de venir à ce rendez-vous symbolique, et ce jour là nous nous mettons à repenser à notre histoire familiale.

Donc il y a une sorte de partage des eaux à faire entre :

o       
conduire au quotidien une éducation pour nos adolescents 

o        savoir dire «  oui  », savoir dire « non ».

o        o         mener notre vie d’adultes, avec nos déprimes, nos manques, les combats que nous menons .

Nous sommes constamment en train de faire la part des choses, entre ce besoin de devenir nous-mêmes, en tant qu’adultes, et ces enfants qui sont là en train de pousser, de crier, de claquer des portes… Nous nous posons continuellement cette question : ai-je le droit de vivre ma vie encore, dois-je me sacrifier pour mes enfants?

Nous vivons à la fois dans la solitude de notre espace privé, pris dans notre histoire personnelle, et en même temps dans une communauté de personnes avec laquelle nous créons des échanges. C’est ainsi que l’on peut trouver des relais pour mener à bien ce dur travail qui consiste à  faire d’un enfant docile un homme ou une femme responsable.

L’adolescence, c’est un moment de bouleversement pour la personne, qui varie de 10 à 30 ans !!!!

Avec nos enfants, nous avons des «  histoires d’amour ». L’enfant est un support de projection fabuleux : avec lui, nous pouvons rêver de réussir nos rêves…

« Notre enfant sera beau, il sera grand ; Il ne souffrira pas. »

Mais voilà, il ne faut pas l’empêcher de souffrir, il faut l’aider à dépasser la souffrance.

Quand arrive un enfant, il y a du monde autour du berceau : l’enfant vient de deux lignées, toutes ces fées qui veulent du bien à l’enfant et forment des vœux pour que cet enfant soit unique, mais en même temps affilié, rattaché à une histoire. Tout enfant est «  reconnu », on se l’approprie ; il y a comme « un massage psychique » qui permet de faire de cet être notre enfant et de transférer sur lui tous les rêves que nous avons dans la tête… L’enfant est docile, c’est un «  beau miroir », jusqu’au jour où…il ne veut plus se rendre au repas familial, et où il s’enferme dans la salle de bains (le déclic de la salle de bain signifie soudain qu’il est une personne privée).

L’enfant, qui était notre « régal », cette «  fête charnelle »où on l’embrassait, le « mangeait » de baisers, soudain se rebiffe. Interdit de toucher ! L’adolescent s’écarte, et là est le premier signe !

Il veut vivre seul sa métamorphose intime. Et nous, on est mal parce que l’on a encore besoin de ce corps. Peut-être que les pères s’aperçoivent plus tard du changement… »
    

Respecter l’intimité de l’adolescent

La plupart du temps, l’adolescent veut vivre sa métamorphose intime seul. Il s é-carte physiquement ; s’enferme dans sa chambre, s’échappe dans un univers secret, dans la musique, les jeux vidéo, l’ordinateur, laisse ses vêtements ou ses livres en tas dans sa chambre… (Du bon usage du tas : « si vous ne pouvez pas aller jusqu’au lit de votre fils, n’y allez pas ! »)

Toute une technique pour nous faire comprendre qu’ils ne veulent pas de nous, ce qui ne signifie pas qu’ils n’ont pas besoin de nous… Il faut accepter cet éloignement…

Sa métamorphose le rend aussi malheureux que vous. Les ados essaient de saisir leur corps, l’exhibant ou le cachant en fonction de leur acceptation ou de leur refus de ce corps qui change sans cesse et les dérange (la dispense de sport est le motif de consultation médicale le plus fréquent à cet âge). Ils se regardent beaucoup dans le miroir : «  A quoi je ressemble ? » Le miroir des copains est aussi fondamental… Il leur donne des indices sur leur identité. Ils vont nous montrer qu’ils sont capables d’avoir des amis bien à eux, qu’ils ont le désir et la possibilité d’établir leur propre réseau… Le look des ados, «  le lucky look » ne porte pas les indices de votre culture et de votre niveau de vie, il crée une identité d’alliance avec les pairs et rompt ainsi l’identité de filiation.

Quant à la sexualité, il est préférable de ne pas devancer leurs questions et de les laisser les poser au rythme qui leur convient ; ou de mettre en évidence des livres sur le sujet adaptés à leur âge, négligemment posés sur une étagère.
 

Eduquer plutôt que donner

Les adolescents réclament souvent beaucoup d’objets ou de vêtements pour avoir l’air « branché ». C’est souvent un signe de fragilité, et il ne faut pas s’y tromper : « l’avoir » ne remplace pas «  l’être ». Pour « être » il faut « faire ». Beaucoup de parents ne supportent pas l’idée de frustrer leurs adolescents, et leur achètent tout ce qu’ils demandent pour « leur faire plaisir ».

Or souvent au lieu de les aider à traverser le manque, on leur donne ce qui nous a manqué. Un héritage peut tuer si l’enfant ne se l’approprie pas.

 « Ce que tu as hérité de tes pairs, travaille-le pour le posséder ».

Pour pouvoir s’inscrire dans la généalogie de notre famille, pour hériter sans crouler sous la dette, il faut transformer ce processus dans le don…

Ne gâtez pas trop votre enfant, n’allez pas trop au devant de ses demandes ; qu’il apprenne à travailler pour être à la hauteur de son héritage.

Que la famille soit aisée ou carencée, le travail éducatif est le même. Tenir sa place de parent tous les jours : ni trop près, ni trop loin. Père et mère ont à tenir leur position parentale, qui permet à un enfant d’être l’enfant de son histoire.
 

Négocier

Il est important que les parents soient clairs sur ce qui est négociable et non négociable, selon les valeurs de chaque famille. La réussite scolaire pourrait paraître «  non négociable », mais l’adolescent a aussi besoin de se sentir reconnu par nous dans d’autres domaines qui lui sont chers (musique, peinture…). Il réussira ses études et pas les vôtres ! Une passion créatrice leur permet d’ailleurs souvent de passer l’adolescence avec moins de remous.
 

Accepter la turbulence sans se laisser détruire

Les adolescents prennent souvent des risques pour tester notre capacité de parents à être les garants d’un monde qui a du sens.
 

Le travail d’adolescence est un travail qui va nous bouleverser, les crises ont un sens à décrypter pour chacun d’entre nous, et touchent nos points de fragilité, à nous parents.  L’adolescent a simplement besoin de devenir l’enfant « adulte » de ses parents.

Compte rendu  par Claire Bataille Pascale Courtois Dominique de Taisne 

CONFERENCE LE 6 MAI 2003 à L’EABJM



haut de page La Source - 26 chemin du Bessayré - 31240 SAINT JEAN
Tél. (33) 05.61.74.23.74 / Fax : (33) 05.61.74.44.52 / Mail :