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'La séparation'

La séparation
La séparation
par Hélène BRUNSCHWIG

La  "séparation " à la fin de l'analyse,  du côté de  l'analyste et du côté du patient.  

Voilà une situation bien compliquée et délicate, très différente selon les cas. Je vais esquisser, à travers mon expérience personnelle, le point de vue du patient et par ailleurs celui de l'analyste. J'ai en effet vécu les deux situations, et je ferai chemin faisant quelques reflexions théorico-cliniques. Mais d'abord, à tout seigneur, tout honneur, qu'en pense Freud ? Dans son " Analyse avec fin et analyse sans fin ", il se montre très pragmatique. L'analyse est terminée à deux conditions : " que le patient ne souffre plus de ses symptômes, ait surmonté ses inhibitions comme ses angoisses " et " que l'analyste juge que l'on n'ait pas à craindre la répétition des processus pathologiques en question ". Il nous dit aussi qu'il a parfois dû reprendre des analyses qu'il croyait terminées, pour " liquider le transfert " ou parce que des catastrophes s'étaient produites dans la vie des patients. Il pense aussi qu'il dépend du destin de chacun que la force puisée dans l'analyse puisse aider le patient à lutter contre les difficultés rencontrées dans la vie. Il se pourra que l'on ait besoin de recourir à nouveau à une aide analytique. Les progrès escomptés par Freud jouent sur le " renforcement du moi " et la modification de la " force des pulsions. " Freud pense que l'analyse laisse au patient une capacité importante de continuer seul le processus analytique, à condition de ne pas être débordé par de nouveaux traumatismes. Ce qui est tout à fait exact.

Agnès Bardon a écrit un très joli livre sur les différents moments clefs de l'analyse . Elle inteviewe plusieurs personnes, notamment sur la fin de l'analyse. C'est passionnant de voir les différences individuelles : les uns ne se souviennent plus de leur dernière séance, ils ont l'impression que leur analyse continue toute seule, les autres ont été très secoués par la séparation, d'autres encore étaient enchantés de s'arrêter enfin!

Se séparer de son analyste

Par deux fois, j'ai dû affronter la séparation d'avec mes thérapeutes. J'avais entrepris, dans mes jeunes années, une thérapie de relaxation, type Schutz-Ajurriaguera, avec une psychanalyste, Mlle de M. C'était tout à fait passionnant, car ce n'était pas du tout une analyse au rabais, comme cela se disait parfois à l'époque. C'était un travail sur le corps, entrepris avec quelq'un qui pouvait donner des interprétations et faire le lien avec des ressentis anciens. Ce fut très efficace pour calmer mes angoisses et mes somatisations. Voilà qu'au bout de deux ans, mon analyste-relaxatrice me proposa de penser à arrêter nos séances. J'allais beaucoup mieux et j'étais heureuse que ma thérapeute s'en soit aperçu. Puis, insidieusement s'infiltra en moi une terrible angoisse : si j'arrête je ne la verrai plus, jamais je ne supporterai cela. Nous en avons évidemment longuement parlé, nous avons pris quelques semaines pour travailler exclusivement " la séparation ". Les séances se sont arrêtées, je l'ai supporté, mais j'ai gardé au fond de moi le sentiment que cet arrêt m'avait été imposé . En fait, je n'avais pas entièrement accepté cette séparation, je n'avais pas complètement " fait mon deuil " de ces rencontres avec de M. Mais c'était un sentiment assez flou, car d'autre part, j'étais heureuse d'avoir fini avec ce traitement assez contraignant par ailleurs ; je me sentais tout de même vraiment bien dans ma peau, avec un nouvel équilibre évident et une impression d'avoir franchi un cap.
Mais, beaucoup plus tard, engagée dans un travail de formation auprès d'enfants, en psycho-pédagogie, j'ai ressenti que le moment était venu de répondre à ce besoin qui me taraudait depuis longtemps : faire une analyse. Après avoir rencontré plusieurs analystes, j'ai choisi la plus jolie! la plus intuitive aussi, Mme C.

Au bout de quelques années, je n'avais pas encore terminé mon analyse et des problèmes psychosomatiques ont ressurgi. Il a semblé opportun que je refasse quelques séances de relaxation, avec Mlle de M. quittée environ dix ans auparavant. J'y suis retournée, pour les raisons que viens d'indiquer et parce que mon analyste trouvait bon que j'aie un autre lieu, très différent de celui de l'analyse ; mais j'y suis allée aussi pour parler de cette " petite dent " rancunière que je ressentais encore confusément contre elle...



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