A la Rencontre des idées et des pratiques en psychologie et psychanalyse

Lou Andréa Salomé

Lou ANDREAS-SALOME

   Egérie, romancière, essayiste, psychanalyste… Lou Andreas-Salomé a déchaîné les passions et laissé un sillage qui ne cesse de rayonner. 

De grands yeux clairs, avides et graves, une lourde chevelure blonde nouée en chignon, un visage de madone intelligente… Ljola von Salomé eût pu se contenter de briller dans les salons que lui promettait sa naissance dans l’aristocratie russe éclairée. Mais quand l’esprit vient aux femmes, il emporte tout. Figure même de l’égérie, Lou Andreas-Salomé sera l’inspiratrice, la muse, l’amie de trois immenses génies du XXe siècle. Loin de se brûler à leurs feux, elle accompagnera leur œuvre et, aujourd’hui encore, sa trace illumine les leurs. 

La passion de Nietzsche 

Lou Andreas-Salomé n’a que 21 ans lorsqu’elle rencontre Friedrich Nietzsche. Elle le fascine. Il l’initie à sa philosophie et brûle d’amour pour cette femme-enfant qui se refuse à lui. Dépressif et suicidaire, le philosophe rêve de transmettre à ce jeune esprit en friche l’essence même de sa pensée. L’exaltation ne dure que quelques mois et se brise sur le refus inébranlable et répété de Lou de l’épouser. Mais cette rencontre nourrira longtemps l’œuvre de Nietzsche qui, l’année suivant la « rupture », écrit son Ainsi parlait Zarathoustra. Ces deux-là ne se reverront jamais, mais le génie de l’homme à déchiffrer le tréfonds des êtres constituera sans doute, pour Lou, le terreau de sa pratique future de la psychanalyse. Celui qui écrivait : « Tous nos motifs conscients sont des phénomènes de surface. L’être humain est composé d’une pluralité de forces quasi personnifiées dont tantôt l’une, tantôt l’autre se situe à l’avant-scène et prend l’aspect du moi », aura été le levain d’une intelligence qui ne demandait qu’à s’affranchir. 

La muse de Rilke

Quinze ans après « l’aventure nietzschéenne », Lou rencontre un poète de quatorze ans son cadet, René Maria Rilke (qu’elle rebaptisera Rainer). Elle est alors mariée à Friedrich Carl Andreas, dont elle portera le nom, accolé au sien, pour la postérité. Un mari qui la rassure ? Qui la repose ? Sans doute. Mais un mari avec lequel elle ne couche pas. C’est une vierge de 36 ans qui n’a cessé de croire que l’épanouissement de l’esprit ne passait que par le refus du corps qui se donne avec passion à Rilke. Il la surnomme « mon buisson ardent ». L’amour dure trois ans, l’amitié lui survivra plus de trente. Elle le guide sur le chemin du dépouillement de l’écriture, comme « une mère et une muse attentive ». Il transforme cet esprit parfait en femme, cette princesse de neige en amoureuse passionnée. « J’ai été ta femme pendant des années parce que tu fus la première réalité où l’homme et le corps sont indiscernables l’un de l’autre », lui écrira-t-elle. 

La disciple de Freud

Après le grand frère et l’amant, le dernier grand homme de Lou ressort de la figure paternelle, ce père qu’elle a perdu alors qu’elle avait 5 ans. Elle fait la connaissance de Sigmund Freud en 1911 et lui écrit peu de temps après : « Ma vie était en attente de la psychanalyse depuis que j’ai quitté l’enfance. » Elle est acceptée dans le premier cercle des pionniers et devient l’amie intime d’Anna Freud. La «compreneuse par excellence », comme l’appelait Freud, ne laisse pas la trace d’une grande théoricienne (sa contribution la plus connue porte sur le narcissisme, en 1921), mais ce n’est pas sa principale préoccupation. Elle se veut davantage « poète » et « artiste de la psychanalyse ». 

Lorsqu’elle meurt, en 1937, elle est déjà une légende. Pourtant, un paradoxe persiste : celle que trop souvent on ne connaît que par les hommes dont elle a croisé le chemin vaut encore mieux que cette image d’égérie. Lou Andreas-Salomé est la figure de proue d’une nouvelle race de femmes. Moderne, européenne, avide de savoir et de liberté, y compris sexuelle, briseuse de carcans et future brûleuse de corsets. La vie de l’égérie par excellence est celle d’une émancipation féminine, d’une bâtisseuse de ponts entre deux siècles. 
D'autres grands noms de la psychanalyse seront abordés en cours d'année
   Il est fréquent de constater que pour plusieurs personnes le corpus analytique semble se limiter au texte des œuvres de Freud. Pourtant, dès les débuts de son travail, Freud. a été entouré de plusieurs collaborateurs. Certains ont élaboré des œuvres faisant preuve d'une pensée créatrice et originale qui, tout en s'inscrivant dans l'héritage freudien ont su s'aventurer sur des terres nouvelles ou ont pu examiner sous d'autres angles des questions ayant déjà fait l'objet de diverses élaborations. Nous vous proposerons chaque mois de brefs portraits des personnages marquants de la psychanalyse.
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